Handicap & troubles du comportement. Retour sur notre webinaire

Chaque année, le 3 décembre est la journée mondiale des personnes handicapées. A cette occasion, deuxiemeavis.fr a organisé un webinaire sur ce sujet. 

Durant ce webinaire, deux intervenants spécialistes, Docteur Djéa Saravane et Professeur Eric Willaye ont répondu aux questions de Pauline d’Orgeval, Présidente et co-fondatrice de deuxiemeavis.fr.

Le Dr Djéa Saravane est médecin polyvalent. Il est ancien chef de service du « Centre Régional Douleur et Soins Somatiques en Santé Mentale, Autisme, Polyhandicap et Handicap Génétique Rare» à l’EPS (Etablissement Public de Santé) Barthélemy Durand à Etampes (91) qu’il a ouvert en 2013.
Le Dr Djéa Saravane est médecin de l’Association Handidactique. Il est praticien au sein de l'Établissement public en Santé Mentale Georges Daumézon dans le Loiret et il s’occupe de la prise en charge globale des enfants autistes dans les CMP-HDJ du pôle de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent de cet établissement.

Le Pr Eric Willaye est Docteur en Psychologie. Il est spécialisé dans le secteur de la clinique comportementale, de l’analyse et du traitement des troubles du comportement ainsi que des différents modèles de programmation des interventions. 

Il est, par ailleurs, le Directeur général de la Fondation SUSA (Service Universitaire Spécialisé pour personnes avec Autisme). 

Qu’est-ce qu’un “trouble du comportement” et quels types de handicap sont concernés ? 

Dr Saravane [2:07] : Quand on parle du "comportement-problème'', il y a plusieurs définitions. La plus simple, que l’on retrouve dans beaucoup de littératures, est la définition d’Emerson : “Comportements d’une intensité, fréquence ou durée, telle que la sécurité physique de la personne, ou d’autrui, est probablement mise sérieusement en danger, ou comme des comportements susceptibles de limiter ou d’empêcher l’accès et l’utilisation des services ordinaires de la cité”. 

Les comportements-problèmes ne concernent pas toutes les personnes en situation de handicap. Les handicaps concernés sont principalement les troubles du spectre de l’autisme, les troubles de déficiences intellectuelles et également le handicap psychique et le handicap mental.

Tout comportement a une signification et l’expression de quelque chose qui nécessite d’être investigué (investigation médicale, environnementale et relationnelle). 

Les comportements-problèmes peuvent se manifester de diverses manières : par exemple, l’automutilation se caractérise par le fait de se mordre, de s’arracher les cheveux, de se frapper la tête. Alors que l’hétéro-agressivité quant à elle, va se manifester par le fait de taper, pousser, cogner etc. 

Quelles sont les conséquences pour les personnes et leur famille ? 

Pr Willaye [6:06] : Les conséquences de la présence de troubles du comportement sont nombreuses à tous les âges de la vie de la personne.

Aujourd’hui, on définit plutôt les troubles du comportement au travers des conséquences sur la vie de la personne et sur la vie de l’entourage que par le type même de trouble du comportement. 

Il y a des conséquences majeures qui sont des conséquences liées à l’exclusion sociale, voire à l’exclusion même des services spécialisés.
Il va donc y avoir des conséquences sur la santé (physique et mentale) de la personne et de son entourage, des conséquences sur la famille etc. 

Les troubles du comportement ont donc un effet sur la personne, sur l’environnement familial, sur l’environnement qui environne la famille et sur les professionnels qui accompagnent ces personnes

Quelles sont les causes possibles de ces troubles du comportement?

Dr Saravane [9:38] : Dans le cadre médical, il y a des comorbidités pouvant entraîner des troubles du comportement. Par exemple :

• Les crises d'épilepsie sont extrêmement douloureuses, il faut les détecter donc cela entraîne des troubles du comportement
• Les troubles gastro-intestinaux, par exemple le reflux gastro-oesophagien, peuvent entraîner des troubles du comportement car cela entraîne des douleurs épouvantables. 
• Pour les troubles du sommeil, c’est la même chose : des moments périodiques avec des réveils nocturnes qui sont des moments douloureux. 

Pr Willaye [13:38] : Pour de nombreux troubles du comportement, au-delà d’avoir fait une investigation des causes somatiques, il faut évaluer quelles sont les fonctions : il y a des fonctions d’obtention et des fonctions d’évitement.

Peut-on prévenir ces troubles du comportement ?

Dr Saravane [17:56] : Pour prévenir ces troubles du comportement, on utilise l’approche biopsychosociale, c’est-à-dire, tenir compte de la personne en question mais également de l’environnement ou elle se situe.

Pr Willaye [20:50] : Une des dimensions préventives importantes est la formation des parents au sujet de la communication avec leur enfant. Il y a un effort essentiel de pouvoir disposer très précocement d’installer auprès de ses enfants des outils de communication qui progresseront.

C’est un outil préventif vis-à-vis des troubles du comportement. 

Aussi, il est important de bien savoir ce qu’est le problème de l’enfant ou de l’adolescent. Très souvent, on parle d’autisme, de déficience intellectuelle. Mais qu’est-ce que l’autisme ? Comment vit une personne autiste ? Comment est-ce qu’elle appréhende son environnement ? Tout cela est important pour pouvoir offrir un environnement s’adaptant à la personne. 

Est-il possible de les traiter, notamment dans des situations extrêmes ?

Pr Willaye [25:20] : L’enfant est en train de tout détruire ? De frapper son petit frère ? Que dois-je faire à ce moment-là ? 

Ce que le parent ou le professionnel fait à ce moment-là, n’est certainement pas ce qui fera que le comportement ne réapparaîtra pas. 

Surtout, il est important de garder son calme. Crier, être agité, ne fait qu’augmenter la pression.Parfois, il est question de devoir contenir la personne. C’est une chose difficile à faire surtout face à un adolescent ou un adulte. 

Il faut veiller à ne pas prendre trop de risques : toucher la personne, l’approcher n’est pas nécessairement une bonne idée. 

Il est donc important de discuter avec des professionnels sur les modalités qui peuvent être mises en place. 

Il y a aussi la question de la médication car il arrive parfois qu’elle soit préconisée dans des situations d’urgence. La médication pro ré nata, par exemple, que l’on donne au besoin, mais qu’il faut prendre avec beaucoup de prudence car si elle est trop souvent donnée, elle devient une médication permanente et non “au besoin”.

Quels professionnels de santé consulter ?

Dr Saravane [31:44] : Il est important d’intégrer et de former le médecin traitant de la personne en question car les spécialistes peuvent travailler en collaboration avec lui. 
Le professionnel de première ligne est le médecin de famille parce qu’il connaît déjà l’enfant, il a une relation de confiance avec lui. 

Pr Willaye [33:25] : On peut souligner l’existence d’équipes mobiles qui se dédient à l’accompagnement de personnes ayant des troubles du comportement. 
La collaboration entre les familles et les équipes professionnelles est quelque chose de très important. 

Retrouvez l’intégralité du webinar en vidéo ici : 

https://www.youtube.com/watch?v=3VVYkpWn9Tk